Message satellite de Philippe Lamy

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Laisser les processus de structuration se dérouler !

Alors que j'étais à Lavoisier (Gagny) en cycle 3, Bernard Collot était venu visiter la classe. Un regard extérieur, et particulièrement affûté comme celui de Bernard, m'était nécessaire à ce moment pour voir plus clair. A dire vrai, j'étais déjà persuadé que les mécanismes observés et théorisés par Bernard dans son premier livre fonctionnaient dans ma classe, cependant
dans le long texte que Bernard a consacré à cette visite, certains points ont été relevé par lui (je reprends en partie ses termes) :
- Architecture différente entraînant la difficulté de créer des espaces spécifiques de travail (à part l'informatique délimité dans l'espace)
- Difficulté pour des productions individuelles à enrichir la production collective, leur fin collective trouvant difficilement une place identifiée (dans un atelier spécifique délimité dans l'espace).
- La classe fonctionne plus en "activité permanente" qu'en "atelier permanent" (ces derniers n'étant pas matérialisés).
- Ces activités permanentes entraînent une mobilité de groupes d'enfants qui se constituent en fonction des activités pour se dissoudre tout aussi rapidement et/ou se reformer de façons différentes, alors que certains enfants continuent leur activité sur plusieurs heures.
- A l'époque 2 moments collectifs : une réunion "à la demande" vers 10h30 et une fixe vers 15h30.
- Ces réunions sont davantage tournées comme un regard (un retour) sur le collectif, son état, ce qu'il fait, alimentée plus par l'événement intérieur que par des événements extérieurs et individuels.
- Difficulté pour Bernard de percevoir le rôle organisateur de la réunion (gestion du temps, décisions..)
- Rôle du plan de travail qui ne semble pas avoir un rôle structurant, rôle qui lui est habituellement dévolu (structuration de l'activité...).
- Pas d'inscription... avec la question comment se forment ses groupes de "travailleurs" ?
- Plus de loi écrites, personne ne s'en préoccupant pas "sauf en cas de bêtises !, obéir à la loi n'étant plus alors un but en soi.
- Proximité des activités, mais pas d'interactivité facile (sauf au coin informatique) du fait de l'organisation de l'espace (V. plus haut)

Avec en extrait de conclusion : "En une journée je n’ai pu voir la genèse d’ une activité, son origine événementielle et l’entrée de l’événement dans le système classe, en quoi et comment elle modifiait l’organisation, ce qu’elle provoquait en aval ou la fin de sa trajectoire. D’où l’impression d’avoir vu une tranche d’un « continuum » dont le début est indéterminé et dont la fin l’est tout autant. Un peu comme si l’on débarquait une heure ou deux sur le plateau de tournage d’un film où l’on voit des choses étonnantes, une animation extrêmement complexe qui semble ne rien devoir au hasard mais où tout dépend de tout… et où l’on éprouve quelque vertige en se demandant comment le metteur en scène et les membres de l’équipe ont pu faire pour que le moment auquel on assiste existe et comment ils vont faire pour arriver à un terme...

Bref, cette longue citation pour dire qu'en gros, en ce début de deuxième trimestre, je retrouve dans notre classe commune de Bobigny beaucoup de similitude avec ce qui se vivait alors à Gagny.
Pourtant je n'éprouvais jusqu'à dernièrement qu'agacement et insatisfaction et c'est en relisant ce long texte de Bernard il y a deux jours, (j'en avais oublié toute l'analyse et le questionnement), que je me suis dit qu'il existait bien une spécifité "3ème type urbaine" et qu'il ne servait à rien de vouloir recréer Moussac à Bobigny. En me dégageant de "ce modèle" que je m'imposais pour "recréer les conditions de la classe de cycle qui marche", je mesure à nouveau l'infinité richesse et la subversivité de ce qui se vit dans ce groupe d'enfants et qu'il reste beaucoup à analyser pour comprendre pourquoi "ça marche"...
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