A partir de l'ouverture d'une porte

Lorsque l'espace classe s'étend à deux classes

 

Deux classes de cycle 3. Deux enseignants avec des expériences et des passés différents mais tous deux "experts" dans le tâtonnement expérimental contrôlé. Philippe Lamy et Nathalie Benech.

On peut considérer que le point de départ de ce qui va se passer (ou ne pas se passer) est une porte maintenue ouverte entre deux classes. Pour caractériser simplement chacune des classes avant l'ouverture, disons que les enfants y circulent librement et continuellement.

En bleu, les réactions ou questions. En rouge les opinions

Novembre : Tout baigne - Mars : interrogations - Mars : demande temps mort svp !

 

Philippe Lamy, 28 novembre 2005

J'ai intégré depuis ce début d'année, l'école Marie Curie de Bobigny.
L'équipe, en cinq années, a réussit à faire d'une école sinistrée en ZEP des ZEP, une formidable aventure professionnelle.
Pour ma part, je suis dans une classe multi-âges de cycle 3.
Très vite, la structure des ateliers permanents avec une ou deux réunions quotidiennes s'est mise en place. Le travail en amont de l'équipe, entre autres sur l'autonomie, la libre circulation... portant ses fruits, je trouvais des enfants dont les pratiques individuelles et collectives me permettaient, dès l'avant Toussaint, de retrouver les conditions du cycle 3 précédent à Gagny.
A l'époque de Gagny, une étape importante avait été franchie, puisqu'il était démontré qu'à conditions quasi identiques (multi-âge, temps, espace, décentrage du maître...), ce qui avait été possible dans la classe de Bernard Collot, se retrouvait dans une classe urbaine du 93.
Pour ma part, j'avais senti que cette "transposition" pouvait prendre une autre dimension, si s'intégrait dans le processus, une autre classe de la même école.
A Curie, la classe de cycle 3 de Nathalie Benech, voisine de la mienne, avait un fonctionnement très proche. Dès le jour de la rentrée, il a suffit de laisser la porte entre nos deux classes ouverte, pour qu'un espace de communication s'établisse. Modeste dans un premier, le flux augmenta sensiblement lors des semaines suivantes. Les rencontres se faisaient dans le couloir (les portes donnant sur le couloir sont également ouvertes en permanence), sur le seuil entre nos deux classes... de timides projets communs naissaient.
Il y a 3 semaines, Nathalie et moi avons proposé aux enfants de faire des réunions communes, à 10h40, à l'essai et ce sur 1/2 heure. Cela était pour nous une sécurité car nous craignions une dispersion rapide des 40 gamins réunis. Si la première réunions a été "pour la chauffe", la deuxième nous a surpris par la qualité de l'échange, le tout géré bien sûr par deux enfants (un de chaque classe). Cela a duré une bonne semaine...
La semaine dernière, un des enfants de Nathalie a pris la parole : "Moi je propose, puisque que maintenant on travaille ensemble, qu'il n'y ait plus qu'une seule classe de 40 enfants avec deux maîtres...". Échange de regard entre les deux instits... qui se taisent, échanges entre les gamins pour en quelques paroles entériner la chose, le vote final officialise la fusion entre nos deux classes.

 

Philippe le 30 novembre

Nathalie et moi sommes étonnés de ce qui se passe, de la façon rapide dont les enfants se sont emparés de cette nouvelle structure. Nous régulons au coup par coup, parfois entre deux portes et la réunion commune quotidienne nous y aide.
Par ailleurs, nous avons accueilli samedi matin des parents des deux classes (une bonne quinzaine). Ces derniers sont restés toute la matinée avec les enfants, travaillant avec eux, certains enfants apprenant des choses aux parents. Les parents se sont glissés dans le flux d'activités, sans heurt, comme naturellement. Nathalie et moi n'avions pratiquement rien à faire. La réunion avec 40 enfants et quinze parents a été un grand moment de plaisir.
Nous voudrions noter, observer, prendre le temps du regard extérieur. Nous allons nous appuyer sur la "grille" de méthodologie qui a été discutée sur la liste du 3ème type pour ce projet de travail...

Philippe 20 mars - Interrogations

Cette semaine, nous avons reçu le film tourné par l'équipe de la TV coréenne en octobre dernier. Le film est réalisé dans sa presque totalité dans la classe de Nathalie et dans la mienne. A l'époque, ces deux classes n'étaient pas "communes", dans le sens où les enfants n'avaient pas encore en l'exprimant officiellement, institutionnalisé
cet état de fait. Je dis bien état de fait, car dans le film, on voit bien les enfants circuler d'une classe à l'autre par la porte qui nous sépare et engager communément des activités.
C'est fin novembre qu'à l'initiative d'un des gosses, la réunion a voté la classe commune.

Depuis, comme nous l'avons parfois relaté, il a fallu vivre avec ça, trouver les moyens de faire vivre 40 enfants avec 2 instits.
En ce moment, nous fonctionnons avec deux réunions quotidiennes, toutes les deux après les récréations du matin et de l'après-midi, réunions dont une au moins est obligatoire, c'est-à-dire qu'un enfant doit participer au moins une fois à une de ces réunions.
Pour le reste du temps, à part quelque moments collectifs non dérogatoires (intervenants anglais, sport, exposés, création maths chez Nathalie ou projet spécifique à une classe), les activités permanentes permettent ou non (selon les désirs des enfants) les rencontres entre les enfants.

Tout pourrait paraître idyllique, si quelques enfants de la classe de Nathalie n'avaient manifesté de temps en temps leur souhait d'arrêter la classe unique (euh ! lapsus sous mes doigts ;-)...la classe commune. Jusqu'à maintenant l'argumentaire de ces enfants faisait ressortir l'impression d'une sorte d'envahissement de leur espace (classe de Nathalie) par les autres élèves (les "miens"), envahissement accompagné d'un fourmillement, source d'agitation et de bruit qui n'existait pas, selon eux, avant*. Etait gênant pour eux également le sentiment d'être obliger de faire tout ensemble (sorties par exemple...). Dans le même temps, ils ne pouvaient envisager d'arrêter le
marché aux savoirs, qui est bien sûr commun aux deux classes...

A ces propositions d'arrêter, la réunion (à mon grand soulagement) votait contre. Il est vrai que cela semblait difficile de revenir à une situation qui paradoxalement n'avait jamais existée, car classe commune "officielle" ou non, des relations d'échanges avaient toujours existées. L'absolu aurait été alors de fermer la porte entre les deux classes pour cesser effectivement toute rencontre.
Il semblait bien que la situation était quelque peu inextricable, si ce n'était alors de nous engager à trouver ensemble les moyens que ce sentiment d'envahissement disparaisse ou tout au moins s'atténue.
Nathalie et moi avons mis l'accent sur des déplacements plus silencieux,le chuchotement...

Ce matin, à la réunion, c'est Nathalie elle-même qui a envisagé de faire une pause en ce qui concerne la classe commune, (j'ai noté qu'il n'y a pas eu d'écho particulier du côté des enfants...). Cependant, ma contrariété a été énorme !... Nous en avons discuté ensemble ce midi. Il ressort que pour elle, cela va trop vite, qu'elle a le sentiment de ne pas tout maîtriser, que cette agitation la perturbe...

Sans partager ses impressions, j'ai le sentiment pour ma part que nous arrivons à un tournant. La tentation de freiner est compréhensible mais je pense que la piste à explorer est dans un réaménagement de l'espace commun.
En effet, nous disposons de deux classes, d'un couloir, d'une classe qui sert de lieu de réunion et de salle vidéo, plus d'une salle de bibliothèque. Accessoirement, avec la libre circulation, nous occupons aussi la cour ou peuvent se dérouler des activités, comme pendant le marché aux savoirs par exemple. C'est dire si l'on a de quoi respirer !...
Cependant, dans nos deux classes, rien a changé. C'est-à-dire qu'il y a deux salles, aménagées comme deux classes indépendantes, avec deux coins maths, deux coins informatique, deux coins sciences (un dans chaque classe), tout en étant classe commune avec des enfants qui circulent et qui se regroupent...

Mon avis pour l'instant, est d'envisager à moyen terme de modifier cette architecture. En gros, au doublon "des coins", envisager une meilleure répartition de ceux-ci, mais dans les deux salles. J'ai en tête l'architecture des classes uniques de campagne, le plus souvent avec deux salles jumelles (à l'époque une pour les filles et une pour les garçons), architecture qui a permis de multiplier les ateliers ("coins" chez nous) et une meilleure circulation des enfants tout en offrant un espace d'occupation mieux réparti.

Ce matin, avant l'intervention de Nathalie et l'expression de ses doutes, nous discutions avec les enfants sur l'intérêt de modifier l'agencement de l'atelier informatique. Le déclencheur a été que nous sommes allés hier visiter le musée de l'air et de l'espace du Bourget.
Dans le même temps, j'ai installé sur un des ordinateurs de la "classe" de Nathalie, un logiciel de simulation de vol. L'intérêt des enfants est manifeste car il est plaisant d'essayer de piloter un avion (et en plus on fait plein de trucs qui doivent bien être dans le programme avec ça...), mais immanquablement cela va créer un regroupement, une occupation de cet ordinateur peut-être incompatible avec d'autres activités... autant de problèmes à prendre en compte et qu'il nous faut résoudre.
L'idée de regrouper les ordinateurs a émergé, de les répartir différemment (ensemble les ordinateurs pour écrire, ensemble les autres (consultation de CD-Rom, jeux, simulation...), voire de les mettre dans une salle qui jouxte nos deux classes... bref des pistes de réaménagement car le plaisir de faire de l'avion va sûrement développer les imaginations.
Ce texte un peu long pour me permettre de réfléchir tout haut et de faire appel à vos idées. Nous sommes deux instits à chercher des solutions pragmatiques et que l'on constate encore que tout progrès n'est pas forcément linéaire...
* Il est bon de savoir que les nombreux visiteurs qui viennent passer quelques temps dans notre classe ne sont pas particulièrement choqués par le bruit de la classe, au prorata des activités qui s'y déroulent.

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Mehdi

J'aurais aimé vous demander :

1) comment se passe le suivi des élèves dans votre (vos?) classe(s) ? et comment y réfléchissez vous ensemble  ?

2) comment travaillez vous tous les 2 ? est-ce au "feeling" ? ou bien avez vous instaurer des moments réguliers ? quelles règles/contrat (s'il y en a)

vous êtes vous fixés tous les 2 ? (mes questions ne sont pas anodines et sont en lien avec les doutes de

Nathalie...)

Loin de moi l’idée , même au-delà de ma contrariété, de ne pas faire une pause, comme sur un palier d’escalier pour faire le point. Surtout que Nathalie, aussi bien dans sa réflexion que dans personnalité, a les moyens de me résister ;-))))

D’ailleurs, cette pause je l’avais proposée à Nath il y a quelque temps. Cependant, je ne sais pas ce que veux dire « pause ». Il me semble impossible de fermer la porte, de ne plus faire réunion commune (encore que…). Est-ce que la pause peut se situer dans ce que nous percevons de nécessaire à faire et simplement le reporter un peu plus tard ? Peut-être, par contre, si il y a nécessité de faire pour améliorer (je pense à ce réaménagement par exemple, tout en voyant bien que c’est MA solution…) et que l’on ne le fait pas, nous restons sur un statu quo qui ne résout rien.

Je crois, et surtout après avoir vu le film et entendu les enfants s’exprimer avec les coréens en dehors de Nathalie et de moi, que les enfants perçoivent bien l’intérêt de cette classe commune. Simplement quand ça grippe un peu, c’est la classe commune qui est mise en cause. Il suffit peut-être  de déplacer un peu le regard et de voir avec eux que le problème n’est pas là où l’on le cherche pour que d’autres horizons s’ouvrent. Nul doute que ce travail est à faire aussi chez les adultes.

J’entends bien que la pause dans une action n’est pas régression. Elle permet de faire le point, de retrouver ses marques, de faire un bilan, d’infirmer ou de confirmer telle ou telle intuition, donc pas de souci… simplement écrire sur une liste de copains/copines permet d’élargir l’échange, de témoigner, de profiter d’un espace de confiance et d’envisager des solutions ou des propositions de solutions.

 

Medhi : 1) comment se passe le suivi des élèves dans votre (vos?) classe(s)

 

Pour ma part, c’est une question qui ne préoccupe plus particulièrement. Cela ne veut pas dire que je n’en soucie pas, mais cela se fait en dehors de représentations classiques. J’entends par représentations classiques les tableaux à double entrée, les pointages réguliers…

Les multiples activités menées par les enfants recoupe un moment ou un autre ce qui est demandé par les programmes et dans le même temps va bien au-delà de ce qui est indiqué dans les dits programmes. Par ailleurs ils apprennent par des voies qui ne sont indiquées nulle part. Nous sommes bien dans la construction d’un personne, dans ses multiples aspects (dans ce qui est mesurable, évaluable et ce qui ne l’est pas), dans sa complexité sans pour autant que les programmes, et donc l’action pédagogique  du maître soit une contrainte qui empêche les enfants d’apprendre. (euh !... c’est peut-être pas très clair !...).

 Les activités des enfants me renseignent autant sur ce qu’ils apprennent, sur ce qu’ils savent, sur ce qu’ils ne savent pas, sur les blocages aussi bien sur du « scolaire » que sur le « non scolaire ».Elles me renseignent aussi sur ce qu’ils sont ou sur ce que je crois qu’ils sont. La vie de la classe est source permanente d’informations. Une partie étant  visualisable via l’arbre des connaissances.

Cela ne m’empêche pas de m’inquiéter, de m’irriter parfois quand j’ai l’impression que cela ne va pas comme je voudrais que cela aille, mais à la finalité il y a toujours quelque chose qui vient me rassurer.

Il y a quelques scènes dans le film des coréens qui sont pour moi source de satisfaction. Ainsi deux ou trois enfants partent d’une feuille, d’un aimant et d’un trombone, trombone qu’ils déplacent sur la feuille à l’aide de l’aimant. De ce truc là, ils en font un circuit tracé sur un carton, avec décor et c’est une petite voiture en carton qui se déplace. Cette activité a mobilisé 4 enfants, dans le couloir sur un temps important. Une des enfants interrogée par les coréens dit y avoir appris « à travailler en groupe ». Voilà ce qu’elle en retire principalement, elle qui a justement des problèmes dans la relation aux autres. Est-ce à dire qu’au-delà de ce que l’on apprend « inconsciemment », on a conscience d’apprendre ce qui nous manque le plus ?

Un autre enfant  explique qu’il s’entraîne tout seul sur des opérations dans le but de passer un brevet…Deux autres dans le coin math s’organisent pour que l’un apprenne à l’autre des multiplications. Tout cela je ne le vois pas constamment, car c’est impossible pour moi si ce n’est à passer une énergie folle à remplir des tableaux. Disons que je constate simplement les multiples bienfaits  de ces multiples activités.

 

et comment y réfléchissez vous ensemble  ?

 

Nath, tu penses que l’on y réfléchit ensemble ?

Pour aller dans le sens de ce que j’écris plus haut, je vais plutôt essayer de réfléchir et d’agir à ce que c’est multiples activités puissent se réaliser au mieux. Je vais donc travailler à l’aménagement architectural, à augmenter l’espace éducatif, à faciliter la circulation, à mettre de l’huile dans les rouages car c’est bien là que mon action peut-être la plus efficace et nécessaire et non dans un acte pédagogique ou plus d’une fois sur deux je vais merder.

Je pense d’ailleurs que Nath et moi en sommes là et c’est sur cela que l’on réfléchit… tout haut

 

Jean-Noël

Juste un mot pour (te) dire que, même si votre fonctionnement est expérimental, c'est un peu pour moi comme un rêve.
Et cela, pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, il s'agit de coopération entre adultes au SENS fort. C'est même un exemple pour les enfants lorsque l'on favorise la coopération entre
eux justement.
Les intérêts induits en découlent alors ! Si une certaine forme d'échange de services existe alors, même ces services peuvent tourner...
Je vois d'ailleurs plusieurs niveau de coopération entre 2 maîtres :
- 1) compagnonage, où l'un serait de "bons conseils" pour l'autre (le plus expérimenté).
- 2) travail à deux où chacun apporterait de l'eau au moulin de l'autre, donnerait des idées, des avis mais sans travail coopératif entre les élèves.
- 3) travail à deux et avec les élèves (de même niveau ou pas) : échanges de services, activités ou sorties tous ensemble etc.
- 4) travail à deux avec les deux classes regroupées.

Je pense que vous êtes dans le niveau 4 ou bien très près. En tout cas, c'est certainement extrêmement "formateur" au SENS fort également. Peut-être une des difficultés est de permettre à chaque classe de conserver une identité propre tout en étant le plus souvent "mélangées". Et cela semble paradoxal ! Préserver une identité jusqu'à ce que les élèves en aient construit une commune suffisemment forte pour ne plus avoir besoin d'identité de classe à part. Et pour cela, faire voter peut ne même pas être la meilleure solution car si un tiers ressent un léger mal à l'aise, cela peut aller à contre sens et être un peu préjudiciable. Mais j'ai cru comprendre à te lire également que tu croyait apercevoir un "col" après lequel chacun aurait trouvé (ou retrouvé?) ses marques. Ca c'est du tâtonnement de maîtres au SENS fort, non ?
Instit pendant 4 ans, j'ai peut-être bifurqué vers un "lieux" (le collège -lycée) où la chose est moins encore possible qu'au primaire. A voir.
 

Roger :

A mon avis et  selon ma propre expérience... Il ne peut y avoir de coopération vraie entre enfants si elle n'est pas mise en place entre les adultes au sein de l'école... Et quand les deux fonctionnent on change de niveau

 

Jean-Noël

D'accord et pas d'accord car il y a dans la notion de coopération entre adultes autant de cas particuliers que d'équipes (dans le sens large d'équipes "potentielles").
C'est ainsi que différents niveaux (sans hiérarchie je pense) peuvent être supperposés d'après moi :
- travail en direction collégiale ou pas (et qualité de ce travail); répartition des tâches, roulement etc.
En particulier :
- degrès d'ouverture sur l'extérieur de l'équipe (parents, asoc. etc).
- nombre et qualité des projets coopératifs menés entre les enseignants.
- prise en charge du développement du travail de théorisation des pratiques menées (ou au moins prise de recul),
- auto-évaluation, co-évaluations, bilans.  et notamment : suivi des parcours individuels des élèves par l'équipe,
- degrès de coopération permis (et encadré) entre les élèves, entre les classes; travail des enseignants associé. et, comme on le voit avec Philippe et Nathalie (niveau 4 de la "classification" donnée niveau coopération entre maîtres ):
- travail pédagogique associé ... entre classes.
Et il en manque bien sûr !
D'ailleurs, existe-t-il un "guide pour l'enseignant intéressé par le travail en équipe" ? EN tout cas rien qui ne soit suggéré dans les IUFM, si ce n'est le fameux "travaillez en équipe"...
Sinon, un enseignant motivé et engagé dans sa classe peut toujours faire de belles choses. Et lorsque cela se passe au niveau des adultes aussi, ca ne peut que faciliter le travail coopératif des élèves. Comme tu le dis, la coopération entre les maîtres est presque une condition de la coopération entre les élèves. Sauf que les maîtres peuvent aussi coopérer pour, de fait, en faire le moins possible et être "tranquilles".
Il y a cependant aussi le niveau au dessus : quand l'Inspection propose un travail coopératif (donc enrichissant des deux côtés), les maîtres reproduisent bien souvent ce mode de travail dans leur classe.
En extrapolant un peu, il ne reste plus qu'à exiger (pour sauter bien des "niveaux" ) que les têtes pensantes de ce pays en fassent de même, à cela près qu'exiger ou imposer n'est pas forcément une marque de coopération bien engagée... comme on peut le voir avec l'imposition de la méthode cil à bic, le CPE...

 

Jérôme Tcherniatinski 

"Peut être que c'est cela que disent, dans vos classes, ces enfants, qui veulent revenir à un cloisonnement. Peut être ne veulent ils pas vraiment régresser; peut être ne veulent ils pas revenir à un système traditionnel; mais qu'ils ont peur de se retrouver dans un groupe trop grand pour eux... 40 à vivre ensemble, c'est quand même beaucoup. À 40, c'est difficile de connaître tout le monde; de côtoyer ceux qui ne nous ressemblent pas.
Dans un grand groupe, il est facile de s'éloigner de ceux qui nous gênent, de créer des sous groupes d'affinité... et finalement de vivre éloigné les uns des autres... Dans une classe unique, la richesse est donnée par l'hétérogénéité du groupe ET par sa petite taille qui "oblige" les uns et les autres à se côtoyer. Même ceux qui sont trop différents..."
Peut être que je suis complètement à coté de la plaque, parce que finalement je ne connais pas vos classes et votre fonctionnement, mais c'est l'idée qui me vient à l'esprit en vous écoutant raconter cette Classe(s).

 

Philippe
Oui, voilà une donnée qui me semble importante. Nous nous sommes posés la question avec Nathalie, non pas sur les échanges qui à 40 ne posent pas de problèmes particuliers, car ils ne sont pas obligatoires et se font dans le spontanéité des actions que veulent entreprendre les enfants, mais sur la réunion. Au début celle-ci était obligatoire, car nous ne voyons pas comment faire pour que les informations qui touchent tout le monde puissent circuler sans que nous ne fassions une réunion avec l'ensemble des gosses.
Puis, nous sommes venus à deux réunions quotidiennes non obligatoires.
Il est vrai que par exemple mardi dernier, la réunion du matin, s'est déroulée à une petite quinzaine avec des échanges passionnants sur l'histoire des langues. Le fait que ces réunions ne soient plus obligatoires ont été un plus, ont cassé le grand groupe et favorisé les échanges.
Je crois qu'il faut continuer sur cette organisation des réunions et ne plus se préoccuper de cet aspect obligatoire, car de toutes façons les informations circulent bien, de même que des activités naissent en dehors des réunions.

Les petites structures de campagne sont un plus par rapport aux grandes structurent urbaines à 10 classes et plus. Ces dernières ne favorisent pas, par la multiplication des acteurs et par l'architecture une modification des structures classes et donc les comportements.
Cependant, je ne pense pas qu'avec Nathalie nous reconstituons une grande structure. Nous sommes dans la configuration d'une école à deux classes. Hors, je pense que ce sont ces deux classes (espaces de deux rectangles avec des ateliers en double) qu'il faut modifier, pour faire une classe à deux salles (une classe = une entité avec deux salles à sa disposition occupées d'ateliers différents à investir selon les besoins).
Il s'agit bien sûr d'une représentation, d'une mise en perspective d'une action qui demande à être confirmée.

 

Philippe Ruelen

Il y a quand même, me semble-t-il, quelque chose de paradoxal dans ce que tu dis Philippe entre :
a) "les multiples activitées menées par les enfants recoupent un moment ou un autre ce qui est demandé par les programmes"
b) "cela ne m'empêche pas de m'inquiéter, de m'irriter parfois uqnad j'ai l'impression que cela ne va pas comme je voudrais"

Tu es ici dans du feeling et, même si je ne dis pas qu'il faut tout pointer, je pense qu'il faut contrôler certains paramètres pour agir, pour réguler, pour orienter.
Si on est inquiet (b), c'est qu'on n'est pas sur du a) dans le temps qu'on partage avec les enfants. Par ailleurs, la socialisation des savoirs est bien de notre ressort. Même si les savoirs normés s'acquièrent d'autant plus facilement que les langages sont développées, que l'enfant est construit, il est de notre ressort de les leur présenter. Et là, il faut bien pointer 2 à 3 bricoles, non ? ;-) et surtout définir une stratégie (comment présenter ces savoirs normés ? individualisation ? par petit groupe ? en réponse à un besoin ou lorsque l'on pense que le langage associé est suffisamment développé ? ..... ?)

Il est évident que le côté facultatif de venir ou non à la réunion est un plus puisque, dans ce cas, la réunion peut alors être considérée par les enfants comme les autres activités hormis le caractère 'rendez-vous'.

Mais, dans ma classe de 20 à 25 gamins environ, lorsque les réunions étaient facultatives, ça foirait non pas en raison de la non circulation des informations dîtes pendant la réunion ( c'est pourtant ce que je dis aux enfants pour la rendre obligatoire !) mais parce que l'on ne se retrouve pas assez ! Il y a un seuil qui assure l'intérêt de la réunion. Je ne pense pas que ce seuil soit un pourcentage du nombre d'enfants de la classe : 1/3 de 20 enfants, soit 7 enfants, c'est quand même nettement moins bien que 13 enfants (1/3 de 40).
D'ailleurs, dans les classes uniques, il y a bien un seuil en dessous duquel ça marche moins bien, non ? Celui-ci est sans doute à rapprocher du nombre d'enfants participants aux réunions.

Bref, en organisant 1 classe de 40 enfants avec 2 adultes, il semblerait qu'on puisse bien plus facilement rendre la réunion facultative : un avantage de plus !

 

Philippe Lamy, En réponse au message de Philippe R.

 

 a)      "les multiples activités menées par les enfants recoupent un moment ou un autre ce qui est demandé par les programmes"

b)      b) "cela ne m'empêche pas de m'inquiéter, de m'irriter parfois quand j'ai l'impression que cela ne va pas comme je voudrais"

 

Quand je suis dans le b), cela n’a pas grand-chose à voir avec le a), c'est-à-dire que je peux « m’agacer » plutôt des petits grands de sable qui grippe la machine. Je suis attaché à ce que les activités se déroulent le mieux possible, à créer, à maintenir les conditions pour que cela fonctionne. Hors je peux être perturbateur, comme certains enfants peuvent l’être. Des gosses énervés, un maître fatigué, trop interventionniste (chez moi cela va de paire…), c’est entre autres choses cela qui me donne l’impression que cela ne va pas comme je voudrais. Par ailleurs, je ne suis pas imperméable aux doutes des autres, mais en général cela ne dure pas trop longtemps et cela ne va trop loin. ;-)

 

Et là, il faut bien pointer 2 à 3 bricoles, non ? ;-) et surtout définir une stratégie (comment présenter ces savoirs normés ? individualisation ? par petit groupe ? en réponse à un besoin ou lorsque l'on pense que le langage associé est suffisamment développé ? ..... ?)

 

Oui, je pointe aussi, je réajuste aussi, je recentre aussi quand je pense que c’est nécessaire, j’essaie quelque chose, en général individuellement, mais bon j’en reviens toujours au même constat que les gosses n’apprennent pas mais à un moment ils savent. Ne me demande pas comment !....


 

Nathalie

Comme vous avez déjà pu le lire l'ouverture de la porte entre nos deux classes s'est faite naturellement, les enfants ont circulé librement entre ces deux espaces, ont fait des activités communes. Cela me convenait parfaitement et me convient encore aujourd'hui

 Ce qui est allé trop vite pour moi se sont les conséquences après la proposition de Sabri de faire classe commune : être 2 maîtres avec 40 enfants ce n'est pas la même chose qu'un avec 20 ; c'est plus dure car  les enfants n'ont pas la même attitude avec le maître réfèrent qu'avec  l'autre maître, la relation individuel avec chacun est plus dilué et le suivie des parcours individuels plus difficile (or j'en ai besoin, d'autant plus que l'évaluation est un chantier en ce moment pour moi), les moments collectifs comme créa math et autres sont "perturbés" par les passages.., il y a plus d'agitation, plus de bruit, du aux nombres.

C'est vrai que la demande réitérée d'arrêter la classe commune par certain élèves m'a fait réfléchir. Même si elle n'a jamais été majoritaire ni clairement argumenté je pense qu'elle exprimait un malaise qu'il faut entendre. Par ailleurs cela n'a jamais voulu dire pour eux de refermer la porte entre les deux classes ni d'arrêter par exemple les échanges de savoir.. ni pour moi d'ailleurs ce serait plûtôt  garder la porte ouverte, faire chacun notre réunion avec possibilité pour les enfants de participer à celle d'à côté, faire chacun son conseil,

garder son bureau dans sa classe, garder ces coins ..

Je percois très bien le fonctionnement d'une classe commune avec un seul coin info, 1 brico.. mais je pense que c'est trop tôt pour moi et sûrement pour un certain nombres d'enfants.

 Je ne suis en classe de cycle 3 que depuis 1 an et demi, et à Curie depuis ans. J'ai avancé à 100 km/h grâce au gepem et à l'équipe. La venue de Philippe à côté de ma classe m'a encore fait franchir de nouveaux  capes ....mais même si je n'ai pas besoin de tout maîtriser ou contrôler dans ce qui se passe dans la classe, les mouches volent,  j'ai encore besoin de les voir  voler, et même d'en apporter. 

je m'enrichis de l'expérience des autres, et Philippe en a beaucoup plus que moi, forcement il est très vieux ;-) mais j'ai aussi besoin de faire mes propre expérience et là je crois que j'ai changé trop de paramètres à la fois , là j'ai besoin de temps